Chapitre 1
Il vivait paisiblement avec sa compagne dans un village. Il avait une maison confortable, exactement similaire aux maisons voisines, à part pour la couleur des volets. Ils étaient bleus, comme les yeux de sa compagne.
Il était amoureux, bercé chaque jour par sa voix dès le réveil, émerveillé par ses formes et sa grâce dans chacun de ses gestes. Et toujours, elle souriait.
Mais un jour, tout changea. Il manquait quelque chose… ce n’était plus comme avant. Elle avait changé. Ou peut-être était-ce lui ? A compter de ce jour, il commença à filer au bar chaque soir, à rentrer plus tard, plus éméché, plus triste. Il traînait dans les rues, croisait toutes sortes de gens inquiétants, d’endroits glauques. Puis à chaque fois, il s’arrêtait devant chez lui avant de rentrer, et observait les volets bleus jusqu’à ce que les larmes lui viennent. Il repensait au passé, il sentait encore dans ses tripes l’engouement d’un amour profond et sans faille. Mais il n’y avait plus ça… Il n’y arrivait plus.
C’était un jeudi. 3h00. Comme d’habitude, il entra chez lui dans un vacarme époustouflant, mais restant intimement convaincu d’être doué d’une prudence et d’une discrétion excellentes pour quelqu’un abîmé par l’alcool. Il gagna ainsi sa chambre.
Personne. Pas un mot, ni une lettre, ni un signe. Il était seul. Déchiré, il s’effondra sur le sol.
« Minable ! Minable ! C’est ta faute ! TA FAUTE ! »
Pris d’une immense fureur, il commença à sauter et battre l’air de ses poings jusqu’à l’épuisement, pensant exorciser un mal inexistant.
Il se réveilla tard le lendemain, au milieu de la chambre complètement retournée. Des traces de son propre sang entachaient les draps et les murs tapissés. On frappait à la porte.
"J’arrive…
- Héhéhé ! C’est Marco ! C’est pour te dire de venir ce soir, hein tu viens ce soir, tu viens, y a des combats à l’Aigle, ça va décoiffer !
- Nan, pas ce soir…
- Allez… t’es… t’es sûr que ça va ?
- Oui. Laisse tomber pour aujourd’hui. Désolé.
- Allez, sors un peu, ça…
- NAN ! FOUS MOI LA PAIX !"
Marco était parmi ses meilleurs amis… Jamais il ne lui avait parlé comme ça.
A peine le temps de se calmer et de tourner les talons, nouveaux coups à la porte.
"Non, Marco c’est pas la peine de…
Une voix étouffée et froide lui répondit. L’individu était caché derrière un masque et habillé de la manière la plus banale qui soit. Pourtant, il avait un ton imposant.
- Vous agressez souvent les gens de la sorte ? Calmez vous, et écoutez moi. Ce serait plus sage. Je sais qui vous êtes… dans les moindres détails.
- Qui êtes-vous ? C’est pas le moment de me donner des ordres !
- Vous avez perdu Elena, je…
- COMMENT ? Comment savez…
- CHUT ! Je sais où elle est. Soyez à 2h00 à l’angle nord de la rue ferrée.
- Qui êtes-vous ?
- A 2h00... Slysern. "
Et il disparut dans la foule.
" "Slysern" ? Il dit me connaitre en détail et ne connait même pas mon nom ? C’est quoi cette farce ? Merde, merde, merde ! Pas le temps de jouer à ça ! "
Sur ces mots il s'effondra à nouveau sur le sol.
Un temps passa. Dehors, le soleil brillait de mille feux, les derniers sortaient pour faire leur marché ou d'autres se retrouvaient autour d'un verre en terrasse. A travers les carreaux, cette vision d'ordinaire réjouissante le répugna.
Il ferma les volets.
"A 2h00..."